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L'Aunis au Xe siècle - La question du Pagus Alienensis

Jacques Duguet

L'organisation administrative carolingienne est connue dans ses grandes lignes, essentiellement grâce aux capitulaires, mais elle peut être difficile à saisir à l'échelon local, du moins avec une certaine précision. Pour notre région, si la chronologie des comtes de Poitiers et d'Angoulême s'établit sans difficulté majeure, la situation politique devient confuse dans le pays de Saintes après la mort du dernier comte, en 866. Les vicomtes peuvent être appréhendés en Poitou et en Angoumois mais on n'en trouve pas trace en Saintonge. Quant aux vicaires, auxiliaires ruraux des comtes, ils n'apparaissent partout que comme souscripteurs d'actes et on relève leurs noms sans entrevoir leur succession. Parallèlement, l'organisation de l’Église est surtout perçue à travers les décisions des conciles et synodes, et les documents régionaux peuvent se révéler avares de renseignements sur la hiérarchie. Ce n'est pas le cas pour les diocèse de Poitiers et d'Angoulême au Xe siècle, dont les évêques sont relativement bien connus, mais, dans le même temps, le diocèse de Saintes se signale par son mutisme ; on remarque en particulier qu'aucun évêque, aucun archidiacre, ne se manifeste alors à l'occasion de nombreuses donations à des abbayes, en particulier de salines aménagées dans des terres d'églises.

Quant aux circonscriptions, la documentation ne permet pas de les définir. La raison principale est l'imprécision du vocabulaire de l'époque : il n'existe pas de correspondance entre les dénominations des charges et les noms des circonscriptions. Ainsi, dans les "chartes" de notre région, le comté n'est appelé ni comitas, ni comitatus, les deux mots du latin classique qui dérivent de comes ; les comtes sont présentés dans des formules du type comes Pictavorum, qui se réfèrent aux "peuples" tels qu'ils sont désignés depuis l'Antiquité, au temps des civitates. Comitatus apparaît bien dans de rares actes mais avec une acception sans rapport avec comes ; ainsi en est-il dans les chartes de Nouaillé, où on rencontre la localisation in comitatu Briosinse, en équivalence avec in pago Briosense d'autres actes (2). Cette pratique de désignation des unités politiques ou administratives par les noms des "peuples" remonte aux temps des civitates : Pictavorum, Santonum, Engolismensium... On considère généralement comme des comtés ou anciens comtés les pagi Pictavus, Santonicus, Engolismensis, des textes médiévaux mais un doute subsiste, au moins sur leur étendue.

Le mot pagus, qui est lui aussi un héritage de l'Antiquité, n'a jamais eu un sens bien défini, tout comme notre mot "pays", qui en dérive.

(Roccafortis n°9, janvier 1992, p.5-20)

Thèmes : étymologie, familles, provinces, seigneurs et seigneuries

L'Aunis au Xe siècle_R9 (231Ko)